L'Herbier de Gustave Dutailly (1846-1906)

L’exposition L’Herbier de Gustave Dutailly donne à voir une large sélection de la collection constituée par Gustave Dutailly (1846-1906), et léguée à la ville de Chaumont. 

Cet ensemble recueilli par le botaniste - deux variétés de roses portent son nom -, collectionneur, député de la Haute-Marne, durant ce que l’on désigna rétrospectivement la Belle Époque (1896-1914), est caractéristique de son temps. 

Qu’il s’agisse de progrès technique, social, sociétal, avec sa collection Gustave Dutailly dessine les contours d’un basculement historique de la société française, européenne mais aussi États-unienne. 

Acteur de la vie politique, son engagement l’emmènera à soutenir la séparation de l’Église et de l’État, la suppression du Sénat, l’instruction primaire laïque et obligatoire, la garantie de la liberté de la presse. Il contribue régulièrement à la Gazette des travailleurs, et prend fait et cause pour les travailleurs.

A cette époque un bloc de gauche, incluant les radicaux dont fait partie Gustave Dutailly, s’affirme et fait front contre la montée des nationalistes au motif de L’affaire Dreyfus (1894-1906). Ce bloc tient position dans le contexte politique et social d’un antisémitisme ancré dans la société française, et du revanchisme suite à l’annexion de l’Alsace-Moselle par l’Allemagne (1871). Ce bloc constitué et uni, dans une France au sortir de la Grande Récession de 1873, permettra une longue période de (semi-)stabilité politique portée par les gouvernements successifs de Pierre Waldeck-Rousseau, Emile Combes et Georges Clémenceau. 

Dans le contexte de la seconde révolution industrielle, on observe le recul de la misère dans cette France de la IIIe république, la persistance des inégalités, les progrès techniques, scientifiques et sociétaux, l’intrusion du temps libre, et des sports amateurs. L’affiche illustrée permise par la chromolithographie, sous l'impulsion de peintres et caricaturistes, se cherche, se développe tant profusément et confusément en véritable champ d’expérimentation plastique et narratif. Oscillant entre réclame et terrain d’expression libre, l’affiche illustrée va révéler quelques particularités, et singularités émergentes, là où le média était auparavant essentiellement de nature typographique. 

Tandis que la Belle Époque désigne paradoxalement tant une époque des nouvelles lumières et des progrès que les contours de la bourgeoisie triomphante, L’Herbier que compose la collection de Gustave Dutailly dessine son époque, de ses paradoxes. 

L’exposition L’Herbier de Gustave Dutailly, par la monstration d’affiches, de documents d’archives, de multiples, de reproductions, d’ajouts, propose de relever quelques contours de la Belle Époque, mais aussi leurs ramifications et familiarités qui auront traversé les siècles. On y rencontre, entres autres, à l’évidence, Jules Chéret (1836-1932), Henri de Toulouse-Lautrec (1864-1901), Pierre Bonnard (1867-1947), Eugène Grasset mais aussi Victor Hugo (1803-1885),  les Frères Lumières, Étienne-Jules Marey (1830-1904), Louise Michel (1830-1905), Antoine Henri Becquerel, Pierre (1859-1906) et Marie Curie (1867-1934) nobélisés en 1903 pour leur recherche sur la radioactivité, William Frederick Cody dit Buffalo Bill (1846-1917), Louise Joséphine Weber dit La Goulue (1866-1929)…

Photos : ©Lili Romanet